Salut les amis, bienvenue sur Pod’Vins, votre podcast 100% Vins, mais pas que, je suis Arnaud, je suis très heureux de vous retrouver pour cet épisode qui va nous conduire une fois de plus en Espagne, il faut dire qu’il y a de quoi faire, et pas n’importe où puisque nous allons parler de la Rioja.
La Rioja, c’est à la fois une communauté autonome, une Province à l’intérieur de cette communauté, je vous ai déjà parlé de l’organisation politique et administrative de l’Espagne et un vignoble qui se situe dans le Nord du pays à 200 km environ au sud des Pyrénées. Attention à ne pas tout confondre, car ce sont bien des choses distinctes car le vignoble mord également sur 2 autres communautés, une partie du Pays basque et un petit bout de la Navarre.
La Rioja est l’une des régions viticoles les plus connues d’Espagne, si ce n’est pas la plus connue, et c’est dû à plusieurs caractéristiques historiques, géographiques et viticoles dont nous allons parler sans plus attendre.
Tout d’abord, c’est la première appellation à avoir été créée en 1925 (même si le statut officiel de DOC sera obtenu en 1970) et c’est également la première à avoir obtenu le statut de DOCa, calificada en 1991. Je vous rappelle qu’il n’y en a que deux en Espagne, le Priorat dont nous avons déjà parlé et donc la Rioja.
C’est une très grande appellation, elle couvre une surface de plus de 65.000 hectares, soit plus de deux fois la surface du vignoble bourguignon pour vous donner une idée, tout ça sur 100 km de long et 40 km de large au maximum.
Et vous vous doutez bien que sur une telle surface, vous allez trouver une très grande diversité de terroirs, de cépages, de méthodes de vinification et bien évidemment de vins. Il n’existe pas un type de Rioja, il y en a une multitude.
Alors pour y voir un peu plus clair, l’appellation est géographiquement divisée en 3 parties, en trois sous-régions : la Rioja Alta qui se trouve sur la partie Ouest, la Rioja Alavesa, la plus petite sur la partie Nord-Ouest et la Rioja Oriental, qu’on appelait avant Rioja Baja avec une connotation un peu négative Baja veut dire basse, sur la partie Est.
C’est important d’avoir en tête cette découpe de la Rioja parce que chacune de ces trois sous-régions a vraiment une identité particulière.
Alors ces zones qu’ont-elles en commun et pourquoi sont-elles différentes ?
Au niveau climatique, on est sur un climat d’ensemble continental mais la Rioja subit deux influences, celle de l’Atlantique et celle de la Méditerranée.
Les influences océaniques concernent les régions plus à l’ouest et au Nord bien sûr, donc la Rioja Alta et la Rioja Alavesa, elles apportent de l’humidité, de la fraîcheur mais de façon modérée car ces 2 zones sont protégées par la grande Sierra de Cantabria qui joue le rôle de barrière naturelle. Les pluies restent donc raisonnables, 450/500mm par an.
Une autre barrière naturelle protège la Rioja Alta au Sud, c’est la Sierra de la Demanda, qui fait partie de ce qu’on appelle le système ibérique, c’est-à-dire une chaîne de montagnes d’altitude moyenne qui borde au nord-est la meseta, le plateau central d’Espagne. Cette Sierra de la Demanda permet de modérer la chaleur qui vient de ce plateau mais est également le point de départ de nombreux cours d’eau qui forment des vallées au cœur de la Rioja Alta et qui vont se jeter dans l’Ebre.
L’Ebre, c’est un fleuve important qui traverse le vignoble d’Ouest en Est.
En revanche, la Rioja Oriental est une région plus chaude et plus sèche, plus proche de la Méditerranée où le vignoble est exploité à des températures plus basses, environ 300 d’altitude alors qu’on peut être jusqu’à 700/800 mètres dans la Rioja Alta ou Alavesa.
Vous avez une grande diversité de sols également, argilo-calcaires dans la Rioja Alavesa, argilo-calcaires, argilo-ferreux et alluviaux dans la Rioja Alta, argilo-ferreux et alluviaux dans la Rioja Oriental.
La Rioja, c’est une terre de vins rouges où le cépage roi est le Tempranillo, un cépage qu’on retrouve dans d’autres appellations espagnoles parfois sous d’autres noms. Vous pouvez entendre Cencibel, Tinto fino, Tinto de Toro, Tinto del país ou encore Ull de Llebre.
Il représente 80% de la production du vignoble et 88% des seuls vins rouges, c’est vraiment la star.
C’est un cépage précoce, temprano en espagnol signifie tôt et qui s’exprime le mieux dans les zones les plus fraîches. Il est donc normal de le retrouver surtout dans la Rioja Alavesa et la Rioja Alta.
Il dégage des arômes de fruits rouges et noirs comme la prune, la fraise, les fruits des bois voire des notes florales comme la violette.
Le Tempranillo peut être vinifié seul ou assemblé avec les autres cépages rouges autorisés comme la Grenache qui s’épanouit mieux à la chaleur dans la Rioja Baja, le Mazuelo qui n’est autre que le Carignan en France ou le Graciano.
Pour les rosés, on est sur une configuration identique.
Dans la Rioja, vous avez également un peu de blancs surtout élaborés à base de Viura, c’est le Macabeu, avec un apport de Grenache blanc et de Malvoisie. 5 autres cépages sont autorisés : sauvignon blanc, verdejo, chardonnay, torrontes, et maturana blanca.
Enfin vous pouvez trouver avec une grande partie de ces cépages, rouges et blancs, des vins effervescents élaborés selon la méthode traditionnelle avec une seconde fermentation en bouteille comme le Champagne.
Pour apporter plus de clarté aux consommateurs, la Rioja a souhaité il y a quelques années mettre en valeur la grande diversité de ses terroirs et a donc créé 4 qualifications.
Tout d’abord Vino de Zona (vin de zone) qui correspond à une des 3 sous-régions. Vous pouvez donc voir sur l’étiquette d’une bouteille DOCa Rioja et Rioja Oriental par exemple. Vous savez que le vin vient de la Rioja Oriental.
Ensuite, Vino de Municipio (vin de municipalité). Il y a 144 communes dans l’appellation Rioja, et idem vous pouvez voir écrit sur l’étiquette de la bouteille Vino de telle commune.
Enfin, Vino de Viñedo Singular (vignoble unique en quelques sortes). Ce sont des vins qui proviennent de parcelles uniques, qui existent depuis plus de 35 ans, qui font l’objet d’un soin plus important avec un cahier des charges plus strict. Vous verrez donc sur l’étiquette Viñedo singular et en général le nom de la parcelle, un peu comme les climats bourguignons.
Je ne vais vous parler de l’histoire viticole de la Rioja mais il y a quand même un tournant important à avoir à l’esprit, c’est le Phylloxéra. En fait, quand il attaqua les vignobles français, il s’est passé 2 choses : la première, c’est qu’il a fallu trouver des raisins et du vin et donc les français se sont adressés aux espagnols et notamment aux viticulteurs de la Rioja. Et cela a tiré les espagnols vers le haut qui ont commencé à modifier leurs méthodes de culture, de vinification, à construire des bodegas, etc…Et la seconde, c’est que des viticulteurs français, notamment bordelais, ont quitté le pays pour se rendre en Espagne, apportant avec eux leurs connaissances et leur savoir-faire. Ensuite, pour la petite histoire, le Phylloxéra ne sait pas arrêter à la frontière. L’Espagne fut touchée comme tout le monde.
Il y a donc une relation intime entre Bordeaux et la Rioja depuis longtemps.
Pourquoi je vous raconte ça ? Simplement parce qu’aujourd’hui, la DO exige que les vins observent une période de vieillissement avant mise sur le marché, d’abord en fûts de chêne de 225 litres comme à Bordeaux puis en bouteille, qui sont des bouteilles de type bordelaises.
L’élevage en fûts de chêne est une caractéristique importante dans la Rioja. On utilisait beaucoup le chêne américain autrefois, qui apporte plutôt des saveurs vanillées, c’est surtout un chêne moins cher, mais aujourd’hui on revient vers le chêne français ou le bois d’autres pays européens qui apportent des notes plus élégantes.
Pour s’y retrouver, il y a 4 catégories :
-le « Rioja » Generico, jeune ou générique, pour lesquels il n’y a pas spécialement d’exigences d’élevage,
-le « Rioja Crianza« , qui vieillit au moins 24 mois, dont au moins 12 en fût de chêne pour les rouges, 18 mois dont 6 en fûts pour les blancs et les rosés,
-le « Rioja Reserva« , qui vieillit au moins 36 mois, dont 12 en fût de chêne et 6 mois en bouteilles pour les rouges et 24 mois dont 6 en fût pour les blancs et les rosés
-et le « Rioja Gran Reserva » qui vieillit au moins 60 mois dont 24 en fût de chêne et 24 en bouteilles pour les rouges et 48 mois dont 6 en fûts pour les blancs et les rosés.
Attention, il n’y a pas forcément de Reserva ou Gran Reserva à chaque millésime. Cela dépend de la qualité du millésime.
Pour les effervescents, je ne rentre pas dans le détail mais sachez qu’il y a 3 catégories : Generico, Reserva et Gran Añada qui signifie Grand Millésime.
Afin de différencier tous ces vins, le Conseil Régulateur de l’appellation a mis en place en 2000, un système de timbre qu’on trouve sur les bouteilles qui permet également de favoriser la traçabilité de chaque bouteille : vert pour les Generico, rouge pour les Crianza, bordeaux pour les Reserva et bleu pour les Gran Reserva.
Les rouges de la Rioja ont de multiples facettes, ils peuvent être vinifiés de façon à être frais et fruités ou puissants et charpentés. Ils sont peut-être un peu plus fins, plus élégants dans la Rioja Alavesa ou Alta où il y a plus de fraîcheur et les conditions nécessaires pour faire des vins de grande qualité. En général, la Rioja Baja propose des vins plus costauds et plus denses.
Vous voyez donc que c’est un peu plus compliqué qu’il n’y paraît. Acheter un Rioja à l’aveugle peut vous conduire à boire un Rioja très fruité élaboré par macération carbonique ou un Rioja super costaud avec un degré d’alcool élevé.
Les uns ou les autres s’associent à merveille avec toutes sortes de viandes, des côtelettes à la côte de bœuf, avec le gibier, avec de la charcuterie espagnole, du chorizo, etc…
Evidemment, vous avez tous les prix et ce n’est pas très compliqué pour vous en procurer.
Il y a plus de 450 domaines produisent leurs vins dans la DO, certains assez connus comme Marqués de Riscal, Marqués de Cáseres, Marqués de Murrieta, Muga, Lan, Roda, Palacios Remondo, Fernando Remirez de Ganuza, Pujanza.
Voilà, après le Priorat, vous voilà calés sur la Rioja, c’est un vignoble incontournable qu’il faut connaître quand on s’intéresse aux vins. Il y a beaucoup à découvrir dans cette région, j’espère que vous prendrez le temps de le faire, pourquoi pas sur place, avec modération bien sûr.
