Le « vin sans alcool » existe-t-il?

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Le « vin sans alcool » existe-t-il?

Bonjour les amis, bienvenue sur Pod’Vins, votre podcast 100% Vins, mais pas que, je suis Arnaud, j’espère que vous vous portez bien, et comme toujours je ne saurais trop vous conseiller d’aller faire un tour sur le site pod-vins.com où vous retrouvez tout le contenu des podcasts et même des quiz désormais, pour jouer ou pour tester vos connaissances.

Aujourd’hui, je vous propose de nous intéresser à un sujet complexe qui soulève pas mal de questions réglementaires et sémantiques. En effet, peut-on parler de vin sans alcool? Est-ce que cela a du sens d’associer le vin, dont l’essence même est l’alcool, et l’absence d’alcool?

Ce sujet est d’autant plus d’actualité qu’alors le marché du vin fait grise mine, celui de ce genre de boissons, non-alcoolisées ou peu alcoolisées, que l’on appelle les “No-Low”, un terme venant de la contraction entre No Alcohol et Low Alcohol, est en pleine expansion, à la faveur de nouveaux modes de consommation et d’évènements qui s’institutionalisent peu à peu comme le Dry January.

Alors afin d’y voir plus clair, il faut déjà s’entendre sur ce qu’est le vin. J’imagine que vous en avez une assez bonne idée si vous écoutez ce podcast mais pour la question qui est posée aujourd’hui, il faut creuser un peu et se référer tout d’abord à la définition du mot.

Le dictionnaire nous dit simplement que le vin est une boisson alcoolisée provenant de la fermentation du raisin. Donc il est dans la définition même du vin que l’alcool est indispensable. La notion de vin sans alcool n’a donc, d’un point de vue sémantique, aucun sens. C’est un abus de langage, purement et simplement.

Mais on peut aller un petit peu plus loin en regardant ce que dit l’Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV) sur le sujet. Selon la réglementation, le vin est défini comme, je cite, « exclusivement la boisson résultant de la fermentation alcoolique complète ou partielle du raisin frais, foulé ou non, ou du moût de raisin ». Là encore, c’est parfaitement clair et notez au passage qu’il est précisé que le vin ne peut provenir que de raisin donc se pose le même débat pour ce qu’on appelle les vins de fruits, d’orange, de citron, etc….

Mais revenons au « vin sans alcool ». Il n’est donc pas considéré comme du vin au sens légal. Personnellement, franchement, ça ne me dérange pas car on comprend exactement de quoi on parle et c’est bien là l’essentiel. Mais c’est la loi, et comme vous le savez, dura lex sed lex.

Alors vous allez me dire, bon d’accord, mais on appelle ça comment?

Et bien, la réglementation européenne a introduit en 2021 deux nouvelles catégories pour les vins ayant subi un processus de désalcoolisation:

-Le vin désalcoolisé, dont le titre alcoométrique est inférieur ou égal à 0,5%; Et qui peut s’appeler « sans alcool », mais pas “vin sans alcool” bien sûr.

Et le vin partiellement désalcoolisé, dont le titre alcoométrique se situe entre 0,5% et 8,5 % vol. ou 9 % vol. (selon la zone viticole).
Et d’ailleurs cette dernière mention est la seule autorisée pour les AOP et IGP, sous réserve que le cahier des charges le prévoie, ce qui n’est à ma connaissance, le cas pour aucune appellation.

Sachez que la mention « 0,0 % vol. » est autorisée sur l’étiquetage d’un vin désalcoolisé dès lors que la présence d’alcool n’est pas détectable à l’analyse (c’est-à-dire inférieur à 0,1 % vol.).

Ces mentions, qui s’appliquent aux vins tranquilles et effervescents, doivent être utilisées sur les étiquettes et dans la communication pour ces produits. De mon point de vue, elles sont peut-être un peu plus barbares que “vins sans alcool” mais elle reflète exactement ce que sont ces boissons, c’est-à-dire, du vin auquel on a retiré l’alcool.

Et il existe à ce jour, d’un point de vue réglementaire, trois procédés de désalcoolisation : l’évaporation sous vide partielle, les techniques membranaires comme l’osmose invese et la distillation sous vide. Chacune de ces méthodes a ses avantages, mais toutes visent à préserver au maximum les caractéristiques organoleptiques du vin original tout en retirant l’alcool. Le choix de la méthode dépend souvent du type de vin et du degré de désalcoolisation souhaité. Je ne rentre pas dans le détail de ces techniques, l’essentiel étant de comprendre le principe général.

Alors à qui s’adresse les vins que l’on a désalcoolisés. Et bien, peut-être étonnament, la clientèle est assez large. Les femmes, et pas seulement lorsqu’elles sont enceintes, sont clairement ciblées. Mais pas seulement bien évidemment. Ce sont les jeunes également, les sportifs, les gens malades sous traitement peut-être ou tout simplement des curieux, les flexibuveurs comme on les appelle, ou des personnes qui apprécient juste ces produits. Car c’est important de le garder à l’esprit, c’est avant tout une boisson. Et si le goût de celle-ci convient, pourquoi s’interdirait-on d’en boire sous une espèce de prétexte, disons, philosophique. Il me semble donc qu’il ne soit pas incompatible de boire du vin et du vin désalcoolisé, à condition toutefois de résister à la tentation de les comparer. Parce que cela ne sert simplement à rien.

Il peut arriver de trouver ça et là des vins désalcoolisés qui pourraient presque nous donner l’illusion de boire du vin mais cela reste aujourd’hui peu fréquent. L’alcool est un composant essentiel de l’équilibre et du goût du vin, donc le retrait de l’alcool se traduit souvent par moins de nuances, de complexité, de fraîcheur, avec un goût qui peut être légèrement plus sucré, un manque de longueur ou de volume.

De plus, il faut bien avoir conscience qu’un certain nombre d´éléments peuvent être ajoutés comme que ce soit des éléments naturels, comme la gomme arabique ou le moût de raisin, mais aussi des acides, des conservateurs ou des antioxydants. Je crois même qu’il existe des vins dits sans alcool interdits aux femmes enceintes.

Il reste cependant possible de goûter de très bonnes bouteilles, qui doivent être juste prises pour ce qu’elles sont.

Aujourd’hui, nous avons parlé de vin mais chaque alcool a aujourd’hui son pendant non alcoolisé : la bière évidemment, le gin, le whisky, etc…Vous trouvez également, à côté des vins désalcoolisés, des boissons sans alcool non fermentées qui sont élaborées à partir de moûts de raisin. Donc là, nous nous éloignons encore plus de l’univers du vin mais pourtant ces boissons peuvent imiter le goût du vin et utiliser le packaging du vin pour séduire les consommateurs.

Un dernier point, si vous aimez acheter des vins et les conserver précieusement dans votre cave, sachez que les vins désalcoolisés possèdent une date de durabilité minimale, date à partir de laquelle le produit peut perdre ses qualités gustatives sans toutefois être considéré comme dangereux pour la santé.

Voilà ce qu’on pouvait dire sur cette histoire de vin sans alcool, expression, qui comme vous l’avez compris, est employée de façon abusive et nul doute que nous en entendrons parler de plus en plus. D’une part, parce qu’il est probable que les viticulteurs arrivent à produire des vins désalcoolisés de plus en plus proches gustativement des vins classiques et d’autre part, parce qu’il s’agit d’une tendance qui devrait se développer chez les consommateurs.

Du coup, les cavistes commencent à s’organiser voire se spécialiser, la Grande Distribution également, et je vous suggère de vous faire conseiller lors de votre achat pour bien profiter de votre bouteille et bien qu’il y ait peu d’alcool, buvez tout de même avec modération.

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