Bonjour à tous, bienvenue sur Pod’Vins, votre podcast 100% Vins, mais pas que, je suis Arnaud, j’espère que vous allez bien et que vous êtes prêts à vous plonger dans l’histoire avec un grand H puisque je vais vous parler d’une région considérée comme le berceau mondial du vin, qui y serait apparu il y a 8000 ans selon des découvertes archéologiques récentes, et ce pays, c’est la Géorgie. Alors je ne vais pas vous détailler tous les vignobles géorgiens mais nous allons nous concentrer sur le plus grand, celui qui assure les ¾ de la production de vin géorgien et qui s’appelle la Kakhétie.
L’histoire de la Géorgie est unique puisque, comme je vous l’ai dit, de nombreuses découvertes archéologiques tendent à prouver que ce pays du Caucase est véritablement le plus ancien pays viticole au monde. Et pourtant, ses vins sont assez méconnus en France et en Europe plus généralement, à tort car la viticulture géorgienne nous réserve pas mal de surprises, mêlant histoire, méthodes ancestrales de fabrication, cépages autoctones et traditions, nous offrant au final une grande diversité de vins mais surtout d’excellente qualité.
Tout d’abord, situons la Géorgie car pas sûr que ça parle à tout le monde. C’est une ancienne république soviétique, située au dessus de la Turquie et de l’Arménie, coincée entre la mer noire à l’Ouest, la Russie au Nord et l’Azerbaidjan à l’Est. Nous sommes à un carrefour entre l’Europe, l’Asie et le Moyen Orient avec toutes les influences que cette position stratégique a pu lui apporter, inclus son lot d’envahisseurs.
Et à l’intérieur de ce petit pays, la région de la Kakhétie se trouve dans sa partie orientale. Grosso modo, autour du 41ème paralléle, à la latitude de Rome ou de Barcelone pour vous donner une idée.
Les conditions météorologiques y sont idéales pour la viticulture, avec des étés chauds, secs et ensoleillés et des hivers modérément froids, les montagnes du Caucase protègeant le vignoble de l’air froid venant de la Russie voisine. D’ailleurs, les montagnes en Géorgie, c’est essentiel puisque 1/3 du pays, c’est de la montagne et près de la moitié de sa superficie se situe à plus de 900 m d’altitude. La Kakethie n’y échappe pas puisqu’elle partage son territoire entre montagnes, forêts et vallées fertiles, notamment celle des rivières Alazani et Iori, à une altitude variant entre 200 et 700 mètres. Du coup, vous trouvez des vignes à la fois dans la plaine mais aussi sur les contreforts des montagnes.
Et ce qu’il est impératif de comprendre, c’est que le vin en Géorgie et en Kakhétie plus qu’ailleurs, c’est très important pour les familles. Tout le monde fait du vin.
Depuis toujours, il joue un rôle essentiel dans la vie des géorgiens, que ce soit dans les cérémonies religieuses comme dans le quotidien.
D’ailleurs, le mot même vin viendrait selon certaines sources du mot géorgien « Gvino », lui-même provenant du mot « Gvivli », définissant quelque chose qui fermente.
Bref, ici tout est une histoire de traditions. A commencer par les méthodes de vinification. Bien sûr les viticulteurs géorgiens utilisent les méthodes modernes pour produire du vin mais ils utilisent également une méthode ancestrale de vinification en qvevri, qui signifie ce qui est entérré, méthode classée en 2013 par l’Unesco au patrimoine culturel immatériel de l’humanité.
Alors qu’est ce que c’est que cette méthode?
C’est une méthode de vinification unique au monde en jarres, en forme d’œufs, faites en terre cuite, recouvertes de chaux, appellées donc Kvevri. Elles font généralement entre 100 et 2000 litres environ, d’ailleurs ça se mesure en unités de 16 litres qu’on appelle des “puti” et sont donc à la base d’une technique qui se transmet de générations en générations. Les raisins sont pressés puis on jette dans une jarre enfouie dans le sol, le jus, les peaux de raisins, les tiges et les pépins. S’ensuit la fermentation sans aucune intervention, sous l’action de levures naturelles, éventuellement une malo, et ensuite la jarre est scellée avec un couvercle (en pierre, en verre ou en métal) et un scellant en argile ou avec des méthodes plus récentes en silicone.
Ainsi, le vin va macérer pendant six mois à 8 mois, à une tempèrature constante, de façon naturelle et sans aucune manipulation pour le perturber. Les géorgiens disent qu’ils laissent le vin à sa mère. Et tout cela lui confère des caractéristiques uniques, des vins sur le fruit, des notes un peu terreuses et surtout beaucoup de fraicheur.
Mais la Géorgie, c’est aussi un trésor pour tous les ampélographes car on y trouve plus de 500 cépages indigènes, différents dans les 10 régions viticoles que comptent le pays. En Kakhétie, seulement une cinquantaine d’entre eux est utilisée pour la production commerciale du vin, dont 3 principaux, le Saperavi pour les rouges, qui fait partie des rares cépages teinturiers dans le monde, avec une chair rouge et une peau rouge, le Rkatsiteli et le Mtsvane pour les blancs.
La Géorgie est un pays de vins blancs, les vignes blanches représentent environ 60%, mais on y fait des vins dans les 3 couleurs et même 4 couleurs car on y produit un vin un peu particulier, qu’on produit d’ailleurs de plus en plus en France, c’est le vin orange ou plutôt le vin ambré comme on dit en Géorgie ou dans les pays anglo-saxons.
Le vin orange, c’est un vin produit à partir de cépages blancs mais vinifié comme un rouge, c’est-à-dire en laissant macérer le jus avec les peaux, sur une durée variable selon les vins. Ce sont donc les polyphénols et les anthocyanes contenus dans la peau du raisin qui donnent cette couleur orange et ces arômes particuliers au vin. Les vins orange ont une structure tannique, une belle puissance aromatique avec des notes de fruits secs, de zestes d’agrumes, avec une pointe d’acidité.
En général, ce sont des vins qui se dégustent entre 12° et 14°, moins frais que les blancs mais un peu plus frais que les rouges.
Les rouges justement sont souvent des vins costauds alors que les blancs ont beaucoup de fraicheur, un bel équilibre entre le gras et l’acidite.
Les vins en Géorgie ont dernière autre particularité. Ils sont catégorisés en fonction de leur teneur en sucre :
-Sec : le taux de sucre est inférieur à 0,3 %.
-Demi-sec : le taux de sucre est inférieur à 3 %.
-Demi-doux : le taux de sucre est inférieur à 8 %.
-Doux : le taux de sucre est inférieur à 20 %.
D’ailleurs sachez que la Géorgie produit des vins rouges doux, qui pourrait faire penser un peu à des vins mutés mais qui n’en sont pas.
Et toutes ces informations, vous les retrouvez le plus souvent sur l´étiquette au même titre que le ou les cépages et parfois l’appellation ou la sous-appellation car la Géorgie s’est calée sur le système de classement européen. On dénombre 24 appellations, qu’on appelle des PDO, pour Protection d’origine désignée, dont la Kakhétie, qui est à la fois une région et une PDO.
Si aujourd’hui les vins géorgiens et de Kakéthie principalement se font petit à petit une place sur la scène internationale, ça n’a pas toujours été des vins de grande qualité. Sous l’URSS, les méthodes traditionnelles avait été délaissées pour une production de masse apte à assouvir les besoins de cet immense pays. Tout le vin produit pouvait être vendu. Pas de besoin de faire beaucoup d’efforts.
Mais dans les années 2000, les choses se sont gâtées avec l’apparition du conflit entre la petite république et la grande Russie. En 2006, l’embargo imposé par la Russie sur les vins géorgiens changea la donne et il fallut trouver de nouveaux débouchés. Et ça signifiait améliorer drastiquement la qualité en revenant aux méthodes ancestrales et aux vins que les géorgiens ont toujours su faire. Bref, le début de la renaissance du vignoble géorgien.
Aujourd’hui, tout va bien pour les vins géorgiens qui se vendent principalement en Russie pour 60% et en Ukraine pour 15%. Ils s’exportent également un peu plus loin mais restent difficiles à trouver. Vous avez quelques offres sur internet et parfois quelques cavistes en proposent. J’en profite pour saluer mes amis Anthony et Giorgi, lui-même géorgien, de la cave Saccré Vin dans le 19ème qui ont une très belle offre de vins géorgiens. Donc si vous êtes sur Paris et que vous voulez goûter des vins géorgiens, je vous encourage à aller leur rendre visite de ma part.
Pour les gourmands, si vous avez l’occasion, essayez les Churchkhela, une confiserie typique de Kakethie à ne pas manquer si d’aventure vous vous rendez en Géorgie, un bonbon confectionné de manière artisanale en plongant des enfilements de noix ans un jus de raisins épaissi avec de la farine.
Voilà les amis, j’espère que cette ballade en Géorgie vous aura plu. Que cela vous donne envie de goûter des vins dont vous ne soupçonniez peut-être même pas l’existence. Donc soyez curieux, faites vous plaisir, d’autant que comme disent les Géorgiens, le vin de Géorgie, soit il est bon, soit il est meilleur. Et avec modération évidemment.
