45ème parallèle, l’équilibre parfait

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45ème parallèle, l’équilibre parfait

Bonjour les amis, bienvenue sur Pod’Vins, votre podcast 100% Vins, mais pas que, je suis Arnaud, j’espère que vous allez bien, je suis ravi de vous retrouver pour ce nouvel épisode. Et aujourd’hui, on ne va parler d’une appellation mais d’un concept, appelez comme vous voulez, c’est le fameux 45ème parallèle.

Si vous suivez mes podcasts, vous avez noté que je vous parle souvent de la Wine Belt, c’est-à-dire cette zone où il est possible de faire du vin de qualité et qui est située entre les 30ème et 50ème paralléle plus ou moins. Au-delà, soit il fait trop chaud parce qu’on se rapproche de l’Equateur, soit il fait trop froid parce qu’on se rapproche des pôles. Trop froid, les raisins ne peuvent pas arriver à maturité, trop chaud, ils ne peuvent pas conserver assez d’acidité et de fraÎcheur pour faire des vins équilibrés ou encore mieux des grands vins.

Mais à l’intérieur de cette ceinture, justement, la plupart de ces grands vins se situe juste à équidistance entre l’Equateur et le pôle, dans une zone tempérée au niveau du 45ème parallèle Nord, là où l’équilibre semble parfait. Car vous le savez, le vin c’est une question d’équilibre avant tout. C’est le cas de l’Oregon où l’on fait de magnifiques Pinot Noir, de Bordeaux que l’on ne présente plus mais aussi d’Hermitage, des vins du Piémont,etc..

Alors, certes, on se focalise sur le 45ème parallèle mais en fait il s’agit plus d’une zone autour de ce 45ème parallèle qui intégre des vignobles proches comme la Bourgogne par exemple, que ne peut pas exclure des plus grands vins du monde et qui se situe au niveau du 47éme parallèle Nord.

Alors une fois au’on a dit ça, cela appelle pas mal de commentaires.

En tout premier lieu, ce qu’on observe au niveau du 45éme parallèle dans l’hémisphère Nord a-t-il son pendant dans l’hémisphère Sud? Autrement dit, fait-on des grands vins au niveau du 45ème parallèle Sud. Et bien la réponse est il n’y en a pas beaucoup mais c’est possible si des conditions bien spécifiques sont réunies. Pourquoi?

D’une part parce que la géographie n’est pas la même, le 45ème parallèle Sud passe à 95% au-dessus des océans. Et pour les 5% qui reste, il passe par l’extrême Sud du Chili et de l’Argentine et également de la Nouvelle Zélande sur de petites territoires, notamment Central Otago dont nous avons parlé récemment.

En fait, dans l’hémisphère Sud, on lui préfère le 35ème parallèle, là oú on observe les vignobles les plus intéressants du Nouveau Monde : la région du Cap, l’Île du Sud en Nouvelle Zélande ou encore la région de Santiago au Chili. Mais reste de toute façon à prendre en compte l’importance du terroir, son histoire et l’influence des masses d’eau qui jouent un rôle beaucoup plus important dans ces régions.

Donc nous n’allons parler que du 45ème paralléle Nord.

Vous pouvez alors vous demander si cette latitude magique est un gage de qualité imparable. En gros, n’y a-t-il que des grands vins autour du 45ème parallèle? Il y en a, vous le savez, toutefois je serais tenté de dire, mais pas que…

C’est relativement simple. Le 45ème paralléle est une ligne de 28385 kilomètres. Si on ne faisait que des grands vins sur cette distance, ça se saurait.

Parce qu’il y a tout d’abord un aspect historique et culturel mais également religieux. Cela ne vous surprendra pas si on ne produit pas de vin en Ouzbékistan où 95% de la population est musulmane, dans le désert de Gobi ou sur les montagnes enneigées de Mongolie, qui sont pourtant sur ce 45ème parallèle.

Ensuite, la situation géographique, pour faire un grand vin, est un critére nécessaire mais pas suffisant. Il faut aussi bien évidemment un terroir de qualité, notamment des sols sur lesquels la vigne pourra s’épanouir. Bref, un trio Homme/Terroir/Cépage optimal.

Le 45éme paralléle n’est donc pas la garantie de faire un grand vin. En fait, c’est comme une bonne main au poker. Ça peut être nécessaire mais Il faut surtout savoir la jouer.

Et quand on comprend l’importance de ce trio Homme/Terroir/Cépage, on comprend qu’il est également possible de faire des grands vins en dehors de cette zone qui gravite autour du 45ème parallèle. La Napa Valley se situe autour du 38ème par exemple, la vallée de la Moselle allemande pas loin du 50ème, plusieurs vignobles italiens tels que les Pouilles ou le Basilicate sont autour du 40ème, et le Malbec s’épanouit en Argentine autour du 32ème paralléle Sud. Bref, les exemples sont nombreux.

Et que dire du Clos Apalta, un vin chilien de la Vallée de colchagua sur le 34éme paralléle Sud qui remporta le titre de Vin de l’année 2008, descerné par le Wine Spectator.

Parce que les Hommes, au travers des siécles, ont réfléchi à la façon de faire le meilleur vin possible, les romains, les moines cisterciens, les nouvelles générations, et se sont adaptés à ce que la Nature leur offrait.

Dans les régions froides comme les Finger Lakes américains ou Okanagan Valley, on a planté les vignes en bordure de lacs profonds qui jouent le rôle de régulateur thermique. Idem dans de nombreux vignobles où un cours d’eau, un fleuve permet de réchauffer les terres environnantes.

Mais ce n’est pas tout. On a réflechit comme optimiser l’exposition des vignes. Ainsi, en Moselle allemande ou en Suisse, dans les régions froides, les vignes regardent le soleil et sont inclinées de façon à maximiser leur exposition car Le degré d’inclinaison des vignes favorisent l’exposition des grappes au soleil donc la maturation. Donc plus on s’éloigne du 45ème vers le nord, plus la pente doit être importante.

Dans les régions chaudes, un courant froid permet souvent de tempérer les effets du soleil. C’est le cas du courant de Humbolt au Chili ou de Benguela dans la région du Cap sans lesquels il serait impensable de faire des vins de qualité. A Los Carneros en Californie, les brises de la baie de San Pablo, apportent également cette fraîcheur salvatrice.

Idem dans les vignobles situés en altitude comme à Utiel-Requena prés de Valence en Espagne, aux abords de la Cordillères des Andes au Chili et en Argentine, qui bénéficient également de températures plus fraîches.

Vega Sicilia, un des plus grands vins du monde, se situe dans la Ribera del Duero sur le 41ème paralléle Nord mais à 800 mètres d’altitude.

Bref, il existe de nombreux facteurs météorologiques ou topographiques qui permettent à de nombreux vignobles d’exister. Chaque vignoble a son particularisme.

Mais ça ne s’arrête pas là. Dame Nature joue un rôle fondamental mais ce sont les Hommes qui font le vin. Et eux sont intervenus depuis des centaines d’années, sur le choix des cépages et les méthodes culturales.

Dans les régions trop fraîches, on opte plutôt pour des cépages précoces, le Riesling, le Pinot Noir ou le Gamay et plus tardifs dans les régions chaudes comme le Cabernet Sauvignon, le Mourvèdre ou le Grenache. Choisir le cépage n’est cependant pas suffisant, il faut choisir un clone, un porte-greffe les mieux adaptés à la terre et aux conditions environnementales.

Les méthodes culturales et de vinification que les vignerons adoptent dépendent aussi de l’endroit oú se trouvent leurs vignes.

Ça commence par le travail du sol, la gestion de l’enherbement, la taille, le nombre d’yeux, la hauteur des pieds, la densité de plantation également.

Vers le Nord, on opte pour densités élevées afin que pour un rendement donné, on puisse se permettre de ne laisser que quelques grappes sur chaque pied. Parce que dans des zones froides oú la maturité des raisins peut être problématique, sur un pied quelques grappes mûrissent besaucoup mieux que de nombreuses grappes.

Puis vient l’effeuillage. Total ou partiel, d’un seul côté. Dans les régions froides, on aura tendance à effeuiller pour capter toute la lumière et la chaleur possibles.

Et à cela s’ajoute toutes les décisions prises dans les chais qu’on ne va pas passer en revue tant il y a d’alternatives, le choix des fûts, les macérations, préfermentaires par exemple, les assemblages, etc…

Et je ne parle pas de la météo, qui d’ailleurs soit dit en passant, est beaucoup plus aléatoire prés du 45ème paralléle qu’en dehors de cette bande. Un bordelais peut difficilement prévoir la qualité du millésime à venir alors qu’un chilien a en principe un peu plus de certitudes.

Pour quel résultat ?

On a tendance à admettre qu’au Nord du 45ème parallèle, là où il fait plus froid, il est préférable de produire des vins blancs qui peuvent conserver de l’acidité et de la fraÎcheur. Ça ne vous étonnera pas si la Champagne, l’Allemagne, l’Alsace ou l’Autriche sont connu pour leurs blancs. Alors qu’au Sud, ce sont plutôt des vins rouges qui peuvent “facilement” arriver à maturité. Evidemment, c’est une généralité, il y a beaucoup de contre-exemples, pour toutes les raisons que nous avons déjà évoquées.

Alors dans le futur, avec le réchauffement climatique, que se passera t’il? Le 45ème parallèle perdra t’il sa position de ligne magique? Il est probable que oui. Il faudra donc aux viticulteurs le courage de s’adapter, de se réinventer, sûrement en faisant évoluer les cépages.

Car quoiqu’il se passe, hier, aujourd’hui et demain, le vin sera toujours fait pàr des viticulteurs qui disposent de cartes de départ et qui doivent utiliser tout leur talent pour gagner la partie.

En attendant, pensez aux meilleurs vins que vous ayez bu, à la latitude à laquelle ils sont produits mais que ce ne soit pas une raison pour ne pas vous aventurer sous d’autres latitudes, avec modération évidemment.

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